dimanche 5 février 2012

L’universelle règle de bonne gouvernance apportée au sein de l'humanité

Pour nos gouvernants si universellement corrompus et ayant érigé le mensonge en dogme suprême : la sagesse intemporelle du Râmâyana.
Ayodhyâkânda, chapitre CX


Quand il eut écouté les propos de Jabâli (un excellent brâhmane qui lui conseillait de renoncer à la promesse faite à son père défunt de laisser son frère Bharata régner à sa place, pour occuper le trône qui lui revenait par ordre de naissance), Râma, ce héros tout de vaillance, lui opposa une réponse parfaitement exemplaire, d’une sagesse sans complaisance :

“ Le discours que tu viens de me tenir pour m’être agréable est inadmissible, même s’il peut sembler juste, et dangereux sous une apparence salutaire. Celui qui passe les bornes, qui adopte une mauvaise conduite et ne sait distinguer la bonne, ne gagne pas l’estime des gens de bien. La conduite seule révèle si l’on est de naissance haute ou basse, si l’on est un héros ou un fanfaron, si l’on est pur ou impur.

L’homme d’honneur ressemble, dans sa forme de manifestation,  à l’homme sans honneur, celui qui est pur à l’impur, celui qui porte des signes fastes à celui qui en est dépourvu, le pervers au vertueux. Si, sous couvert de devoir, je commettais un acte qui trahisse et abuse les gens, je renoncerais à la pureté en agissant contre les prescriptions.

Quel homme sensé au monde, conscient du bien et du mal, me tiendra en haute estime, si je me comporte en scélérat, en corrupteur du monde? Sur qui prendrai-je exemple ? Comment parviendrai-je au ciel si j’adopte une conduite qui fait fi de ma promesse ? Ensuite, le monde entier n’obéira qu’à ses désirs, car les sujets se comportent de la même façon que leurs rois.

La conduite d’un roi doit toujours respecter la vérité et la bonté ; ainsi,  la royauté se fonde sur la vérité, et le monde a la vérité pour assise. Les sages comme les dieux honorent la vérité ; de ce fait, celui qui dit la vérité en ce monde gagnera le séjour suprême, impérissable. On redoute celui qui ment, autant qu’un serpent ; le devoir ancré dans la vérité est en ce monde, dit-on, la racine de tout. La vérité détient la suprématie sur le monde, le devoir est fondé sur la vérité ; tout s’enracine dans la vérité, il n’est pas de recours supérieurs à la vérité. Offrandes, sacrifices, libations, pénitences, pratiques ascétiques, Véda sont fondés sur la vérité, aussi doit-on la prendre pour valeur suprême.

L’un protège le monde, l’autre sa famille, l’un tombe en enfer, l’autre est exalté au ciel. Quant à moi, pourquoi ne suivrais-je pas l’ordre de mon père ? Il était fidèle à sa parole, et sa fidélité détermine la mienne. Ni avidité, ni égarement, ni ignorance ne me plongeront dans une obscurité qui me ferait briser la digue de la vérité : je respecterai la promesse faite à mon maître. Nous avons appris que ni les dieux ni les ancêtres n’acceptent les offrandes de celui qui trahit sa parole, qui est versatile et inconstant. J’ai la ferme conviction que le respect de la vérité est mon devoir personnel : les justes en portent la charge, et je le revendique moi aussi. Je refuse le devoir du ksatriya (le pouvoir de régner) ; le contraire du devoir associé au devoir, ce sont les gens de peu, les méchants, les cupides qui l’observent, ce sont les scélérats. Faire le mal avec son corps, le concevoir en pensée, proférer un mensonge avec sa langue, ce sont les trois sortes de péchés. Terre, renommée, gloire, fortune veulent un homme pour époux ; or, elles ne se soumettent qu’à la vérité : il faut donc servir la vérité.

Assume cette tâche, c’est un bien”, me disais-tu : mais ce que tu considères comme excellent est en fait indigne, ton discours est très spécieux. J’ai fait à mon maître la promesse de vivre en forêt : comment pourrais-je me plier à la volonté de Bharata (qui réclamait aussi que Râma monte sur le trône royal), et trahir l’ordre de mon maître ? J’ai fermement engagé ma parole en présence de mon maître, et la reine Kaikeyi (mère de Bharata) en a éprouvé la plus grande joie. En accomplissant ce séjour en forêt, je suis pur, je restreins ma nourriture, je satisfais les ancêtres et les dieux par de saintes offrandes, racines, fruits et fleurs ; mes cinq sens sont rassasiés, je fais s’accomplir la marche du monde ; ma foi sincère me permet de distinguer le bien du mal.

Lorsque l’on est sur la terre des actes, c’est l’acte vertueux qu’il faut accomplir : Agni, Vayu et Soma ont bien obtenu le fruit de leurs actes. Le roi des dieux, quand il eut offert cent sacrifices, et les  grands sages, après avoir pratiqué de terribles austérités, ont gagné le ciel.

Vérité, devoir, héroïsme, compassion à l’égard des créatures, langage bienveillant, révérence témoignée aux brâhmanes, aux dieux et aux hôtes, voilà le chemin du ciel, disent les justes.

Aussi, dûment avertis de leur intérêt, visant leur plus grand avantage, les brâhmanes observent intégralement leur devoir, en bonne règle, scrupuleusement, dans leur aspiration à atteindre le séjour céleste.

Je juge mauvais que mon père ait toléré la présence de quelqu’un comme toi, à la sagesse dangereuse, d’un nihilisme invétéré qui se réfère à une telle sorte de sagesse et renie le chemin du devoir. Tout sage qu’il soit, celui qui fréquente un nihiliste est le plus condamnable des sujets.
"

1 commentaire:

Setanta a dit…

En relisant ce texte, je me disais que de voir autant de droiture de nos jours est devenu presque impossible et que celui qui pratiquerait ces dons serait prit, soit pour un fou, soit pour un habile menteur.

La Force de Râma tient dans ses argumentations logiques et compréhensibles, ce que l'on ne retrouve nulle part chez nos politiques.

Ça laisse rêveur ! ;-)